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La Loi « Marché du travail » entre en vigueur avec un premier décret d’application

February 22, 2023

La loi « Marché du Travail » du 21 décembre 2022 portant des mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi entre en application à compter du 1er février 2023.

En effet, un premier décret d’application, en date du 26 janvier 2023 précise que les dispositions s’appliquent aux chômeurs dont la rupture du contrat de travail est intervenue après le 1er février 2023.

Ce décret introduit pour la première fois une variation sur la durée de l’indemnisation du chômage en fonction de l’état du marché du travail. Ainsi, si le taux de chômage est inférieur à 9% ou s’il n’a pas progressé de plus de 0.8% en un trimestre, le marché sera considéré comme favorable et la durée de l’indemnisation sera réduite de 25%. En revanche, il n’y aura aucune variation par rapport aux dispositions actuelles si l’état du marché est défavorable.

Plus intéressant pour les sociétés sont les points suivants :

Abandon de poste et chômage

La réforme prévoit le salarié qui abandonne volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai fixé par l’employeur est présumé avoir démissionné à l’issue de ce délai. Un décret en Conseil d’Etat devra fixer la durée minimale du délai.

Le salarié qui contesterait la rupture de son contrat de travail sur le fondement de la présomption de démission peut saisir le conseil de prud’hommes. L’affaire est alors portée directement devant le bureau de jugement qui statue sur la nature de la rupture et ses conséquences dans un délai d’un mois à compter de sa saisine.

Cette disposition a été jugé conforme à la Constitution, le Conseil constitutionnel ayant rappelé la jurisprudence selon laquelle l’abandon de poste ne peut pas revêtir un caractère volontaire s’il est justifié par un motif légitime, tel que des raisons médicales, l’exercice du droit de grève, l’exercice du droit de retrait, le refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à la réglementation ou encore son refus d’une modification unilatérale d’un élément essentiel du contrat de travail.

Le juge devra donc rechercher les circonstances qui ont entourés cet abandon de poste. Il convient de rappeler qu’avant la loi du 21 décembre 2022, l'employeur ne pouvait pas considérer les absences prolongées du salarié comme une démission. Il pouvait seulement licencier le salarié pour faute grave, après l’avoir mis en demeure de reprendre son poste ou de justifier de son absence. Or le licenciement ainsi « forcé » permettait au salarié de recevoir les allocations chômage alors même qu’il n’avait pas perdu involontairement son emploi. Avec les nouvelles dispositions, les salariés abandonnant, sans motif légitime, leur poste de travail de manière prolongée, seront présumés démissionnaires et ne pourront pas bénéficier des allocations chômage. Toutefois, cette présomption est simple, pouvant être renversée devant le conseil de prud'hommes.

Par conséquent, on peut craindre que sans abandonner leur poste de travail certains salariés adoptent une attitude au travail telle que l’employeur n’aura d’autre choix que de les licencier.

Refus d’un contrat à durée indéterminée et chômage

La loi prévoit désormais que, lorsqu’à l’issue d’un contrat à durée déterminée ou d’une mission d’intérim, l’employeur propose au salarié de poursuivre la relation contractuelle dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée et que le salarié refuse l’offre de l’employeur, ce dernier informe Pôle Emploi du refus de l’offre par le salarié. Ce refus est retenu seulement si l’offre est similaire au poste que le salarié occupait en contrat à durée déterminée ou en intérim, c’est-à-dire, qu’elle doit porter sur un même emploi ou un emploi similaire, être au même lieu de travail et avec une rémunération, une durée et une classification au moins équivalentes aux anciennes.

Les demandeurs d’emploi qui auront refusé, au cours des douze derniers mois, deux contrats à durée indéterminée à l’issue d’un contrat à durée déterminée ou d’un contrat d’intérim, dans les conditions visées supra n'auront pas droit aux allocations chômage sauf s'ils ont été employés dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée au cours de la même période.

Ces dispositions devront être précisées par décret. A ce stade, on peut s’interroger sur l’information de Pole emploi par l’employeur : sera-t-elle obligatoire ou simplement possible ? comment s’articuleront les deux refus d’un contrat à durée indéterminée lorsque le demandeur d’emploi aura, au cours de douze derniers mois, travaillé sous contrat à durée déterminée et sous contrat d’intérim ? les deux refus pourrait-il être motivé par des raisons objectives ? un demandeur d’emploi peut en effet avoir accepté une mission d’intérim dans un secteur d’activité ne correspondant à sa formation simplement parce qu’il n'avait pas d’autres opportunités. Doit-il être pénalisé s’il refuse un contrat à durée indéterminée dans ces conditions ?

Elections professionnelles

Enfin, la loi contient une mesure sans rapport avec le marché du travail mais importante pour les entreprises. La loi clarifie les règles relatives à l’électorat et à l’éligibilité aux élections professionnelles. S’agissant de l’électorat, la participation de tous les salariés (y compris ceux qui ont des fonctions pouvant les assimiler au chef d’entreprise) est désormais affirmée sous réserve de répondre aux conditions d’âge et d’ancienneté déjà prévues par le code du travail. En ce qui concerne l’éligibilité, les salariés disposant d’une délégation écrite les conduisant à être assimilés au chef d’entreprise ou qui le représentent devant le comité social économique (CSE) ne peuvent être éligibles et cela conformément à une jurisprudence constante de la Cour de cassation. En d’autres termes, les cadres dirigeants d’une entreprise peuvent désormais voter aux élections professionnelles mais ne peuvent pas être élus.

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