La cour de cassation juge que les statuts de la sas priment sur les actes extra-statutaires, fussent-ils adoptes a l’unanimite
19 septembre 2025Par un arrêt du 9 juillet 2025, la Chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle que, en matière de révocation des dirigeants d’une société par actions simplifiée (SAS), une décision des associés, même prise à l’unanimité, peut compléter les statuts mais non y déroger.
Les statuts de la SAS fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée, notamment les modalités de révocation des dirigeants (article L. 227-1 et L. 227-5 du Code de commerce). Les statuts peuvent ainsi prévoir que le président ou le directeur général de la SAS seront révocables pour certains motifs ou ad nutum, c’est-à-dire sans motif. Ils peuvent également spécifier si la révocation entraînera une indemnisation.
Cependant, il est également possible que le ou les dirigeants concluent avec la société un contrat de mandat, approuvé par les associés, pouvant compléter les statuts ou y déroger. Se pose alors la question du régime devant prévaloir.
En l’espèce, deux textes contradictoires régissaient la révocation du directeur général :
- Les statuts prévoyaient une révocation ad nutum, qui permettaient donc de révoquer sans motif ce dirigeant ;
- Un acte extrastatutaire, en l’espèce un mandat approuvé en assemblée générale par l’unanimité des associés, listait exhaustivement les motifs pour lesquels le directeur général pouvait être révoqué.
Un litige étant survenu à l’occasion de la révocation du directeur général de la société, le premier s’est fondé sur le mandat, la seconde sur les statuts, qui lui permettaient de se soustraire à la démonstration d’un quelconque motif.
En première instance et en appel, les juges donnaient raison au directeur général, la cour d’appel (CA Paris, 16 novembre 2023, n°22/10344) soulignant que les conditions de révocation figurant dans le mandat avaient été approuvées « à l’unanimité des associés lors d’une assemblée générale » ce qui démontrait « la volonté expresse des associés de déroger aux statuts par une décision collective prise aux conditions requises pour modifier les statuts ».
Cet arrêt a été cassé par la Chambre commerciale de la Cour de cassation (Cass. com., 9 juillet 2025, n°24-10.428) qui relève, au visa des articles précités, qu’ « il résulte de ces textes que les statuts de la société par actions simplifiée fixent les conditions dans lesquelles celle-ci est dirigée, notamment les modalités de révocation de ses dirigeants. Si une décision des associés peut compléter les statuts sur ce point, elle ne peut y déroger, quand bien même aurait-elle été prise à l'unanimité ».
En d’autres termes, le fait que l’acte extra-statutaire ait été pris à l’unanimité, soit, comme le relevait la cour d’appel, aux conditions requises pour modifier les statuts, ne permet pas davantage d’y déroger.
Il faut probablement approuver cette décision puisque la solution inverse aurait contribué à créer une certaine insécurité juridique puisqu’auraient pu se multiplier les cas de figure dans lesquels des statuts et des actes extrastatutaires, pris à l’unanimité, se seraient contredits, sans qu’il soit possible de déterminer lesquels devaient prévaloir.
On ajoutera enfin, même si la question n’a été débattue qu’en appel et non devant la Cour de cassation, que la révocation ne doit pas intervenir dans des conditions brutales et vexatoires. Ainsi, si une société peut bénéficier de dispositions statutaires favorables liées à la révocation ad nutum du dirigeant, elle se doit de mettre en œuvre ladite révocation en respectant les droits du dirigeant (respect des droits de la défense, absence de comportements vexatoires, etc.).
La stagiaire Anaïs Devillers a participé à la rédaction de ce LawFlash.
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